Discours de Charles Rayneri
Plusieurs personnalités fondatrices ont été à l’origine des premières Banques Populaires. Si Ludovic de Besse a créé la toute première à Angers en 1878, Charles Rayneri, entrepreneur, banquier et humaniste, est à l’origine du lancement de plusieurs BP dans le sud de la France (Nice, Marseille, Toulouse et surtout Menton). Avec Ludovic de Besse et Eugène Rostand, Charles Rayneri collabore et anime le Centre Fédératif du Crédit Populaire pour structurer et développer les BP. En 1898, au 10e congrès des BP à Angoulême, il prononce un discours remarqué sur sa vision des missions des BP et des atouts du modèle coopératif. Retrouvez en intégralité ce discours prononcé il y a maintenant 126 ans.
« Rien n’est plus facile, rien n’est plus simple que de constituer une Banque Populaire !
Un groupe d’hommes de bonne volonté, d’initiatives, faisant abstraction de toute préoccupation politique ou confessionnelle, n’ayant en vue qu’un signalé service à rendre à leurs semblables, une amélioration économique à poursuivre, pourra sans peine réaliser un pareil projet.
Il ne s’agit pas de réunir d’entrée d’importants capitaux, il ne s’agit pas de débuter avec une légion de sociétaires. Peu d’argent suffit, et un petit nombre de sociétaires bien choisis. L’origine des Banques Populaires les plus puissantes est entourée de modestie, presque de timidité. Ce sont des fleurs humbles, mais dont le parfum n’en est pas moins délicat, et ne tarde pas à se répandre autour d’elles. Petit à petit, ces institutions se développent, deviennent fortes, et cela ne doit pas surprendre, car il n’y a pas de durable que ce qui s’accomplit par degrés, par étapes, et comme on l’a bien dit, le temps ne respecte rien de ce qui se fait sans lui.
Le crédit mis à la portée des travailleurs, de l’intelligence, de l’honnêteté, voilà le résultat que se proposent les Banques Populaires, et ce résultat est tellement grand qu’il est de nature à intéresser à séduire les hommes au cœur bon, qui sentent que le meilleur moyen de faciliter l’entente sociale est encore celui d’aimer un peu ses semblables, de tendre totalement une main à ceux qui sont encore en bas de l’échelle pour les aider à se soulever, pour atténuer leurs souffrances, pour goûter la joie pure que donne la satisfaction d’un devoir accompli.
Lorsque votre Banque Populaire sera constituée d’autres adhérents viendront chaque jour accroître et fortifier vos rangs, votre capital progressera, la petite épargne arrivera graduellement dans vos caisses et augmentera vos ressources. Et puis la cause est si passionnante par elle-même qu’on ne peut que s’y attacher, faire luire un rayon d’espérance au milieu des travailleurs souvent découragés, mettre le capital à leur portée, leur montrer son efficacité par la réunion et la mise en valeur des petites épargnes, les convaincre de cette idée que leur mieux-être ne dépend que… de leur énergie, accrédités par la coopération, n’y a -t-il pas là de quoi séduire des esprits généreux qui auront compris que la satisfaction de la vie ne se résument pas dans une question d’argent et qu’il y a des satisfactions morales qui ont un prix supérieur… ? »